Filière sarrasin en agriculture biologique

La culture du sarrasin ou blé noir, culture emblématique de la Montagne Limousine quasiment abandonnée au milieu du XXe siècle, effectue ces dernières années son retour sur le territoire du Parc surtout en agriculture biologique (AB). La plante et les grains ne manquent effectivement pas d’intérêts pour, entre autres, les abeilles, les agriculteurs, les artisans-crêpiers-pâtissiers-brasseurs, et pour les mangeurs ! Une filière locale (ré)émerge, associant une dynamique sur d’autres graines telles que le chanvre et le blé.

La filière sarrasin / blé noir © PNRML

Pourquoi accompagner la structuration de la filière sarrasin bio ?

Outre les atouts agronomiques et nutritifs du sarrasin, sa culture et transformation représentent une diversification économiquement intéressante pour les exploitations agricoles.

La plante est parfaitement adaptée aux sols pauvres et acides du territoire : elle mobilise peu les éléments fertilisants et est ainsi peu exigeante en azote. Le blé noir possède des propriétés agronomiques à redécouvrir et à promouvoir. Son caractère « nettoyant » vis-à-vis des plantes concurrentes, son cycle rapide (de 100 à 120 jours), l’absence de ravageurs et maladies en font une bonne première culture sur une parcelle. En système herbager, le sarrasin est généralement cultivé derrière une prairie à renouveler ou une friche pour une mise en culture. Ses propriétés mellifères et sa floraison tardive constituent une ressource de nectar et de pollen attirante pour les abeilles et autres pollinisateurs. Peu exigeante en temps de travail, avec peu de charges et une valorisation intéressante surtout en bio pour l’alimentation humaine, la culture a donc aussi un vrai intérêt économique et est une piste intéressante de diversification au sein des fermes.

Le blé noir a beau être adapté aux sols de la Montagne Limousine, sa culture et transformation ont des exigences auxquelles il est nécessaire de trouver des réponses.

Il s’agit de veiller à la constance de la qualité et quantité de sarrasin récolté, de pouvoir sécher (vite après récolte), trier (finement), stocker, transformer (en farine), livrer les acheteurs (dans les temps). Côté production, la plante est sensible au gel en début de cycle, sa floraison longue et échelonnée a pour conséquence une maturité des grains peu homogène qui complique le choix de la date de moisson d’autant plus que celle-ci est tardive et qu’il faut composer avec les pluies possibles.
Alors qu’aujourd’hui l’essentiel de la production est vendue en grains séchés-triés à des moulins en France, le principal facteur limitant du développement d’une filière locale concerne l’accès facile pour les producteurs (souvent de surfaces limitées) à des outils performants de transformation bien sûr, mais aussi de séchage, triage, stockage des grains. La récolte tardive sur le territoire, de septembre à novembre, rend quasi-indispensable le séchage rapide après moisson, la récolte pouvant moisir et rancir en quelques jours et donc être invendable. Autre singularité, la capacité du « sarrasin de Tartarie », la variété historiquement présente sur le plateau, à réapparaître et à jouer les « trouble-fête » : les grains de cette variété fourragère ne figurent pas parmi les attentes des acheteurs professionnels pour l’alimentation humaine. Le tri fin pour écarter toutes autres graines est aussi une étape nécessaire pour répondre aux exigences des moulins et consommateurs sans gluten.

L’accompagnement proposé par le Parc et ses partenaires n’a pas vocation à coordonner la filière, mais à identifier les besoins / manques / aspirations de leurs acteurs pour y apporter des éléments de réponse à même de faciliter la structuration de cette filière en émergence.

Cette dynamique vient répondre aux objectifs de la Charte du Parc en s’inscrivant à la fois dans une diversification agricole avec des modes de production durable (ici en agriculture biologique), dans un lien fort au territoire via des circuits de proximité, dans une rémunération juste des agriculteurs et la création d’emplois, et dans des démarches collectives. Ce travail a été initié en 2016 avec un groupe d’une dizaine d’agriculteurs cultivant ou souhaitant cultivé du blé noir en bio. Le Parc agit aujourd’hui sur l’ensemble des actions présentées en partenariat avec les Chambres d’agriculture de la Corrèze et de la Creuse, ainsi qu’avec la Communauté de communes Creuse Grand Sud.

Chiffres clés

  • Au XIXe siècle, un pic de 80 000 hectares (ha) de blé noir en Limousin (L’agriculture limousine des origines au milieu du XXe siècle, Roger Pouget, 2008).
  • Seulement quelques dizaines d’hectares à partir des années 1950 (même source) !
  • Pour l’alimentation humaine la production en France satisferait au mieux 50 % de la consommation.
  • En Limousin, en 2016 : 3 254 ha de sarrasin, et 112 ha de plus en 2020 (+ 3,44 %).
  • Sur le Parc, en 2016 : 243 ha sur 31 fermes, et 72 ha de plus en 2020 (+ 29,63 %) sur 12 fermes de plus.
  • Sur le Parc en 2020, 71 % des champs de sarrasin sont en bio !

Les actions de ce programme

Améliorer la qualité et la quantité du sarrasin récolté : des essais en plein champs et autres initiatives.

Même si les rendements sont très dépendants des conditions climatiques, aujourd’hui les aspects techniques de la production et de la récolte sont plutôt bien maitrisés. Le rendement moyen en bio est de 10 à 15 quintaux / ha avec des fluctuations pouvant être importantes : l’enjeu est de les réduire tout en fournissant la qualité de grains adaptée aux acheteurs. Côté type de grains, la variété la plus cultivée y compris sur le territoire ces dernières années, est « La harpe », une variété à petits grains qui est d’ailleurs la variété exclusive de « La farine de blé noir de Bretagne IGP ». Toutefois, sur le Plateau, la variété rustique « Petit gris » séduit de plus en plus. Ces éléments ont amené un groupe d’une dizaine de producteurs de blé noir en bio sur la Montagne limousine a travaillé sur les modalités de culture depuis 2016. Avec l’appui de différents partenaires ont été organisés :

Lutter contre l’arrivée du Datura stramonium : une nouvelle priorité qui nous concerne tous.

Plan de Datura

LE DATURA stramoine, une plante TOXIQUE ! pour les humains et les animaux, est désormais en émergence sur le territoire du Parc : la lutte contre son expansion relève d’un enjeu de santé publique et d’un enjeu agricole et alimentaire. Alors que la toxicité de nombreuses plantes dans la nature ne pose pas problème dès lors que nous savons les reconnaitre, avec le Datura, pourtant assez aisé à identifier, les choses sont un peu plus complexes. Le Datura est une plante annuelle contenant dans toutes ses parties des alcaloïdes très toxiques pour les humains et les animaux. De très petites quantités peuvent déclencher une intoxication, et pour les agriculteurs, les récoltes de blé noir ou autres graines si elles sont contaminées ne pourront pas être vendues (les contrôles sont très stricts). Dans certaines zones en France cette culture n’y est plus possible, nous ne voulons pas en arriver là ! Au centre de la lutte pour les agriculteurs comme pour les particuliers : l’observation.

Alors comment reconnaître le Datura stramonium ? Le Datura affectionne les friches, les prairies de pâtures, les bords de route et de rivière, les jardins et particulièrement les cultures d’été comme le sarrasin. Lorsque la plante est développée, c’est simple, suivez le guide et n’hésitez pas à le diffuser.

Chacun peut contribuer à limiter sa dissémination, le premier geste consiste à ne pas semer ou planter ! Les graines sont effectivement autorisées à la vente ! Certains recherchent son aspect ornemental, ou un moyen de lutte (inefficace !) contre les rats taupiers ou les taupes, d’autres sont attirés par les effets psychotropes (inutile d’insister ici sur la grande dangerosité de la pratique). L’observation au champ ou au jardin constitue ensuite le cœur de la lutte. Le Datura, originaire d’Amérique du Sud, fait d’ailleurs désormais l’attention de l’Observatoire Limousin des Plantes Exotiques Envahissantes (CPIE des Pays Creusois, de la Corrèze, FREDON 87) sans pour autant être officiellement reconnu comme tel.

Vous avez du Datura chez vous, que faire ? La priorité est de ne pas laisser monter en graines = intervenir avant les bogues. La fiche « Le Datura » vous présente les étapes à suivre. Vous êtes agriculteurs, une fiche complémentaire est éditée par la Chambre d’agriculture de la Creuse.

Accompagner les démarches collectives structurantes liées aux outils de la récolte à la transformation, et mettre en liens.

Le sarrasin du Parc se décline, par exemple, en cookies au chocolat, en galettes, en bières blanche ou noire à fermentation basse © PNRML

Le développement des filières sarrasin, chanvre, blé et autres graines en bio sur la Montagne limousine passe par l’accès à des outils efficaces et de proximité pour la récolte (surtout en chanvre plus « éprouvant » pour le matériel), un séchage rapide, un tri fin et une transformation (en farine au moins). A la question souvent posée « Vous avez de la farine locale ? », on est bien obligé de répondre, pour le moment, « peu en fait », surtout pour le particulier. Ceci dit, on trouve sur les marchés, à la ferme ou encore dans les épiceries, des produits à base de blé noir cultivé et transformé sur la Montagne Limousine comme des galettes, bières, biscuits sucrés ou salés, du pain. Quelques fermes ou autres structures, sur le territoire ou à proximité, disposaient d’équipements, mais le dimensionnement, l’efficacité des outils ou encore leur non-agrément en bio, ne permettaient pas d’envisager un accès plus large et une plus grande diversité de produits : les choses changent !

Le sarrasin du Parc se décline, par exemple, en cookies au chocolat, en galettes, en bières blanche ou noire à fermentation basse. 

Différents outils ont été, ou sont, mis en place, testés, améliorés par des agriculteurs. Ainsi, dans la continuité du travail engagé en 2016 avec le groupe d’agriculteurs et avec les structures d’accompagnement partenaires, une unité agréée en bio de séchage – triage – stockage – transformation « multigraines » est en cours d’installation sur le Parc, à La Nouaille. Cet outil a bénéficié en 2022 d’une subvention PCAE « Transformation et commercialisation de produits agricoles par les agriculteurs et leurs groupements – projets collectifs » avec 12 exploitations partenaires du projet au dépôt de la candidature. Cet outil est accessible aux producteurs en bio via un système de contrat pluriannuel et avec pour les durées d’au moins 5 ans un accès à prix coûtant.

Vous êtes agriculteurs, artisans-transformateurs, commerçants ou restaurateurs, vous recherchez des conseils entre pairs, un retour d’expérience, une prestation, des graines, un accompagnement… le Parc et ses partenaires peuvent vous y aider.

Les mesures de la charte

Mesure 20 - Relocaliser la transformation, la distribution et la consommation des produits agricoles
Mesure 21 - Développer et promouvoir une agriculture alliant viabilité économique et respect de l’environnement

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